ENVIRONNEMENT THERMIQUE
DES STRUCTURES SEMI-ENTERRÉES

Extrait de la thèse de Frédéric Chabert « Habitat enterré » (mai 1980)

- Unité Pédagogique d’Architecture Groupe ABC

 

 

CALCUL DES TEMPÉRATURES DU SOL

Les variations périodiques des flux radiatifs à la surface du sol déterminent des fluctuations de température en profondeur qui sont réglées par l'équation générale de la chaleur.

q

représente la variation de la température dans le sol

 

c

représente la densité

 

Cp

représente la chaleur spécifique

 

t

représente le temps

 

lx, ly, lz

représentent la capacité thermique dans les trois directions de l'espace

 

w

représente la chaleur produite ou perdue au sein de la roche (habituellement w = 0).

Si l'on considère que la densité, la capacité calorifique et la conductivité thermique sont constantes et identiques en tout point du sol, l'équation s'écrit :

 

E

définit la profondeur en prenant la surface comme origine

 

représente la diffusivité thermique du sol. On pose

On obtient une solution particulière de l'équation (1) si l'on suppose que la température du sol à une profondeur infinie est égale à la moyenne des variations de la température extérieure.

Cette hypothèse s'appuie sur le fait que la température de l'eau souterraine à 10 m ou 20 m de profondeur est très proche de la moyenne annuelle des températures de l'air extérieur.

On admet que la température de l'air à la surface du sol varie de façon sinusoïdale, avec une période T et une amplitude A. Au temps t1, la température de l'air sera déterminée par l'équation :

Au même temps t1, la température du sol à une profondeur E sera déterminée par une équation de la forme suivante :

avec

pulsation du phénomène de période T

 

qm

température moyenne du sol au cours d'une période de variation (supposée la même à toutes les profondeurs)

 

a

amortissement de l’amplitude

 

f

déphasage (retard) de l'onde thermique

Nous avons vu que qm peut être assimilé à la moyenne annuelle des températures de l'air. L'amortissement et le déphasage sont donnés par les relations suivantes :

Les variations dépendent donc des propriétés thermiques du sol, de la périodicité du phénomène considéré et de la profondeur.

 

T

période en heures

 

a

diffusivité thermique du sol en m2/h

Le déphasage

est exprimé en radians.

Pour obtenir sa valeur en heure, il faut multiplier le résultat par

soit

 

L'équation de la variation de la température dans le sol devient donc :

Cette variation a une longueur d'onde .

À une profondeur équivalente à cette longueur d'onde, le déphasage est d'une période entière f = T et la température est pratiquement stabilisée à la moyenne annuelle des températures de l'air extérieur.

Cette formule permet, lorsqu'on en connaît les paramètres, de déterminer la température des sols à différentes profondeurs pour chaque saison.

 

CARACTÉRISTIQUES THERMIQUES DES SOLS

L'équation de la variation de la température dans le sol suppose que la température de surface peut être admise à variation annuelle sinusoïdale, et que la terre est un milieu homogène. Dans la réalité, ces conditions ne sont jamais remplies.

1) La température extérieure ne varie pas d'une façon aussi régulière.

2) Les sols ne sont pas homogènes, ils sont constitués d'éléments d'origine minérale et d'origine organique, mais également d'eau et d'air. Les caractéristiques thermiques des sols dépendent de la nature de leurs constituants, de leur proportion respective et de leur arrangement.

Caractéristiques thermiques des constituants des sols (d'après W.R. Van Wijk)

nature des constituants

Conductivité thermique (W/m°c)

Capacité calorifique volumique Cp(Wh/m3°c)

Diffusivité thermique (m2/h

constituants minéraux

2,92

534

0,0054

constituants organiques

0,25

697

0,00036

eau

0,59

1163

0,00050

air

0,025

0,34

0,0756

Plus un sol est "aéré", moins il conduira la chaleur et moins il présentera d'inertie au réchauffement et au refroidissement (cas du loess par exemple).

3) La conductivité thermique des sols varie avec le contenu d'humidité dans une proportion de 1 à 5 entre un sol sec et un sol saturé. La conductivité fluctue donc selon la saison en fonction des précipitations et des conditions locales.

Les mesures des caractéristiques thermiques des sols sont difficiles à réaliser in situ avec des sondes pleines ou des sondes creuses, car les gradients de température provoquent des mouvements d'humidité qui faussent les résultats. On sait cependant que la diffusivité "apparente" des sols est comprise dans une fourchette de 0,000924 m2/h à 0,00369 m2/h (source: « Earth Temperature and Thermal Diffusivity at Selected Stations in the United States » - T. Kusuda et P.R. Achenbach).

Cependant, pour des calculs qui prennent en compte des phénomènes périodiques de longue durée (une année par exemple), la valeur médiane de la diffusivité, soit 0,0023 m2/h, permet généralement d'appréhender les variations avec une précision suffisante.

 

CALCUL DE LA TEMPÉRATURE DU SOL DANS LA RÉGION D'AVIGNON

données climatiques   latitude : 44°N   températures : moyenne de 1946 à 1970

mois

jan

fév

mar

avr

mai

juin

juil

août

sept

oct

nov

déc

Moyenne annuelle

Température minimale de l'air

2

2,6

5,3

8,1

11,6

15,2

17,4

16,7

14,4

10,4

5,6

2,6

9,33

Température maximale de l'air

9,5

11,5

15,5

19,1

22,9

26,7

29,8

28,7

25,5

20,2

13,9

9,6

19,40

Température moyenne de l'air

5,6

7,0

10,5

13,7

17,3

21,0

23,6

22,7

20,0

15,3

9,8

5,7

14,35

La moyenne annuelle des températures de l'air est de 14,35°C.

qm = 14,35°C

L'amplitude de la variation est de 9°C.

A = 9°C

Pour simplifier les calculs, on écrit l'équation de la variation de la température dans le sol sous la forme :

avec

qm

= 14,35°C

 

A

= 9°C

 

T

= 8766 h (365 jours 1/4)

 

a

= 0,0023 m2/h

 

= 0,222

Le profil des températures à différentes profondeurs est donné dans le tableau suivant :

profondeur

f en jour

A en %

Amplitude des variations

Température du sol

E = -0,25 m

0,0555

5,7

90,6

8,1°C

6,25 < t°C < 22,45

E = -0,50 m

0,0111

11,4

88,2

7,3°C

7,05 < t°C < 21,65

E = -1 m

0,0222

22,9

67,4

6,0°C

8,35 < t°C < 20,35

E = -2 m

0,0444

45,8

45,5

4,0°C

10,35< t°C < 18,35

E = -3 m

0,0666

68,8

30

2,7°C

11,65< t°C < 17,05

E = -4 m

0,0888

91,7

20,7

1,8°C

12,55< t°C < 16,15

E = -5 m

1,110

114,7

13,9

1,2°C

13,15< t°C < 15,55

E = -6 m

1,332

137,6

9,4

0,8°C

13,55< t°C < 15,15

E = -7 m

1,554

160,6

6,3

0,5°C

13,85< t°C < 14,85

E = -8 m

1,776

183,5

4,2

0,3°C

14,05< t°C < 14,65

 

 

ÉVOLUTION DE LA TEMPÉRATURE DU SOL DANS LA RÉGION D'AVIGNON

 

Dans le cadre de ses travaux de recherche à la station de bio-climatologie de l'INRA (Institut National de la Recherche Agronomique) d'Avignon-Montfavet, M. O. De Villèle a procédé à une série de mesures de températures du sol sur une période de cinq ans. Les relevés ont été effectués quotidiennement à 8h TU aux profondeurs de 25 cm, 50 cm, 75 cm et 100 cm, sous un sol gazonné et sous un sol nu, dont la texture se situe à la limite des limons argileux et des argiles limoneuses.

 

Moyenne mensuelle des relevés de la température du sol à Avignon-Montfavet

 

Profondeur          sol gazonné 

 

Jan

Fev

Mars

Avril

Mai

Juin

Juil

Août

Sept

Oct

Nov

Déc

25cm

5,8

6,6

7,6

11,5

15,3

19,0

20,9

21,1

18,7

14,2

10,3

7,0

50 cm

6,9

7,5

8,1

11,5

14,7

18,3

20,3

20,8

19,1

15,4

11,8

8,6

75 cm

7,5

7,8

8,1

11,2

14,1

17,5

19,6

20,3

19,1

15,8

12,5

9,3

100 cm

8,0

8,2

8,4

11,1

13,8

16,9

19,2

20,0

19,1

16,1

12,9

9,9

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

profondeur           sol nu

 

Jan

Fev

Mars

Avril

Mai

Juin

Juil

Août

Sept

Oct

Nov

Déc

25cm

5,1

6,0

7,2

11,2

15,9

19,7

22,3

22,4

18,6

13,3

9,3

6,0

50 cm

6,3

7,0

7,8

11,6

15,6

19,2

21,7

22,2

19,5

15,1

11,2

7,8

75 cm

7,2

7,7

8,2

11,5

14,9

18,4

20,9

21,7

19,7

15,9

12,3

9,0

100 cm

7,6

7,8

8,2

11,0

14,2

17,4

19,9

20,9

19,4

16,1

12,7

9,5

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ainsi que le remarque O. De Villèle, ces résultats font apparaître:

- l'amortissement progressif de l'onde thermique en profondeur;

- l'influence du gazon qui réduit sensiblement les amplitudes de variation de la température du sol, même en profondeur.

 

D'autre part, contrairement à ce que le calcul laisse supposer, la valeur moyenne autour de laquelle varie la température du sol, à l'échelle annuelle, augmente légèrement avec la profondeur.

 

 

 

25 cm

50 cm

75 cm

100 cm

 

Sol gazonné

1,35°C

13,85°C

13,90°C

14°C

qm

Sol nu

13,65°C

14,25°C

14,50°C

14,30°C

 

Ces valeurs sont atteintes, au cours de la première décade de mai et de la dernière décade d'octobre.

 

Les deux graphiques permettent de comparer les variations de la température du sol observées sous un sol gazonné et sous un sol nu, et celles calculées dans le paragraphe précédent.

 

Des écarts sensibles apparaissent entre les valeurs observées et les valeurs calculées:

- en janvier et février, on assiste à un début de réchauffement du sol, suivi d'un brusque refroidissement passager au début du mois de mars;

- le refroidissement du sol se fait plus rapidement que ne le laisseraient prévoir les calculs;

- le réchauffement du sol est également plus lent que ne l'indiquent les calculs (retard dû au refroidissement au début du mois de mars).

 

Tout ceci se traduit par une dissymétrie de la courbe de représentation des températures observées, la phase de réchauffement s'étalant approximativement sur sept mois (janvier et août), alors que le refroidissement se fait en cinq mois.

Par contre, les écarts minimum et maximum des températures du sol correspondent sensiblement aux valeurs observées.

 

- à cinquante centimètres de profondeur, les valeurs minimales et maximales calculées (7,05 °C - 21,65 °C) sont très proches des valeurs observées sous un sol gazonné (6,90 °C - 20,80 °C).

 

Sous un sol nu, les variations ne sont pas fondamentalement différentes (6,3 °C - 22,2 °C).

 

- à un mètre de profondeur, les maxima et les minima calculés (8,35 °C - 20,35 °C) correspondent également aux écarts mesurés sous un sol gazonné (8,00 °C - 20,00 °C) et sont légèrement plus resserrés que les écarts mesurés sous sol nu (7,6 °C - 20,9 °C).

 

La méthode de calcul présentée dans le paragraphe précédent donne donc d'assez bons résultats dans l'ensemble; il convient simplement de tenir compte des remarques qui découlent du refroidissement du début mars dans l'établissement de la courbe de représentation des températures du sol, pour obtenir une image assez fidèle de la réalité.